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L'oeil canadien

Un laboratoire d'astrophysique expérimentale pour maintenir la place du Canada dans l'observation spatiale.

Philippe Vallée, agent de recherche et instrumentaliste au Département de physique, procède à un ajustement de la caméra infrarouge Monica. Le nom de l'appareil ne vient pas de celle à qui vous pensez, mais constitue plutôt l'acronyme de Montreal Infrared Camera.

Auprès les pieds du module lunaire, le bras de la navette spatiale, les mains de la future station orbitale, le Canada participera au développement d'une autre partie de l'anatomie de l'exploration spatiale, l'oeil.

D'ici 2010, le Canada investira en effet 50 millions en dollars américains dans la construction du prochain télescope orbital dont le miroir de 8 mètres équivaudra à celui des plus grands télescopes terrestres (celui de Hubble ne mesure que 2,5 mètres). De 1990 à 2020, le Canada aura de plus investi 100 millions de dollars dans les deux télescopes géants du projet international Gemini à Hawaii et au Chili.

Mais selon Claude Carignan, directeur du centre de recherche Observatoire du mont Mégantic (OMM), l'atteinte de ces objectifs est compromise par le démantèlement des groupes universitaires d'instrumentation astronomique.

"Les astronomes universitaires ne sont plus en mesure de construire les instruments qu'ils vont utiliser sur les grands télescopes, déplore-t-il. Si nous ne pouvons plus fabriquer nos instruments, nous risquons de ne plus comprendre ni de pouvoir suivre les développements technologiques nécessaires à l'avancement d'une science de pointe dans un domaine hautement compétitif."

La construction du télescope Canada-France-Hawaii à la fin des années 1970 avait contribué à la mise en place de plusieurs groupes universitaires d'instrumentation qui ont conçu et réalisé divers outils utilisés par ce télescope et les autres dont dispose le Canada. Mais les restrictions budgétaires subies par les universités canadiennes ont entraîné la disparition de la plupart de ces groupes alors que ceux qui subsistent disposent de ressources inférieures au seuil critique. Pour le projet Gemini, lancé au début de la décennie, toutes les composantes canadiennes ont été produites par l'Institut d'astrophysique Herzberg, un laboratoire du Conseil national de la recherche situé à Victoria, et les retombées ont été presque nulles pour les universités.

L'un des seuls groupes ayant pu maintenir une activité viable est le centre OMM, qui a notamment à son actif la réalisation d'un système d'optique adaptative pour l'Observatoire du mont Mégantic et plusieurs instruments d'observation dans l'infrarouge dont la célèbre caméra Monica, réputée pour être la meilleure caméra infrarouge au monde.

Projet de relance
Claude Carignan a donc pris l'initiative de sonner l'alarme et de proposer, avec ses collègues, la création d'un laboratoire d'astronomie expérimentale qui regrouperait les universités, les industries du secteur et l'Agence spatiale canadienne. Le 7 mai dernier, une rencontre des représentants de ces trois milieux et des organismes subventionnaires a eu lieu à l'Université de Montréal afin d'évaluer la faisabilité du projet.

"Le projet a suscité l'enthousiasme de tous les partenaires, affirme le professeur. Le milieu industriel est désireux d'y participer et les organismes subventionnaires nous ont indiqué les programmes compatibles avec nos objectifs. D'ici un an, nous devrions être en mesure d'aller chercher un budget de 1,3 million de dollars dont le laboratoire aurait besoin pour son fonctionnement."

Ce laboratoire serait créé au sein du centre OMM, qui regroupe des chercheurs des départements de physique de l'UdeM et de Laval. Ses objectifs viseraient la conception et la réalisation d'instruments scientifiques non disponibles commercialement et destinés aux télescopes tant spatiaux que terrestres. Le créneau serait plus particulièrement celui de l'équipement infrarouge pour lequel les membres de l'OMM ont une expertise et qui constituera 75% de l'instrumentation des futurs télescopes.

Le laboratoire aurait aussi une vocation de formation pour le personnel spécialisé. "Si les universités ne peuvent plus former le personnel dont les laboratoires astronomiques on besoin, le Canada sera contraint de recruter ce personnel à l'étranger", craint Claude Carignan.

Le directeur estime également qu'un tel laboratoire serait de nature à attirer au Département de physique une clientèle étudiante intéressée par la physique appliquée.

Daniel Baril


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