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Sur les traces des artistes amérindiens

Alice Cerdan a collaboré à l'exposition Artistes autochtones 1999 - Native Artists.

Alice Cerdan a eu un véritable choc culturel au contact de l'art amérindien qui doit, selon elle, être considéré comme une forme d'art contemporain.


Alors que les native arts, selon l'expression anglo-saxone, jouissent d'une popularité sans précédent d'un bout à l'autre du continent, le Québec n'a pas connu d'exposition collective d'artistes amérindiens depuis 1992. Le Centre d'exposition remédie à la chose en présentant Artistes autochtones 1999 - Native Artists jusqu'au 18 février.

"Ce n'est pas une exposition 'à thème' comme dans une galerie, explique Alice Cerdan, étudiante en histoire de l'art. Nous avons simplement voulu montrer quelques tendances."

Selon cette Française d'origine, qui consacre sa thèse de doctorat à un artiste amérindien de l'Ouest canadien, il faut éviter d'associer l'art amérindien aux "plumes et fourrures". "Il existe un art contemporain autochtone, et il est très peu connu des gens d'ici."

Il est vrai que lorsque les médias d'expression française s'attardent sur les cultures autochtones, c'est généralement pour un sujet relié à la criminalité: vente de cigarettes, confrontation avec la police, construction de barricades... En tout cas, quand elle trouve un journal qui parle de culture autochtone, Alice Cerdan l'achète. Résultat: "J'ai chez moi beaucoup plus d'exemplaires du Globe and Mail et du National Post que de La Presse ou du Devoir."

Cette différence d'attitudes s'exprime aussi dans le rapport des Québécois "de souche" avec l'art amérindien. Tout en militant pour que cette forme d'art acquière le respect qui lui est dû, Alice Cerdan estime que les courants sont difficiles à situer. "Il n'y a pas d'étiquettes possibles en art amérindien", dit-elle.

Regard particulier
Il est vrai que certaines oeuvres de l'exposition en cours ne détonneraient pas dans un musée d'art contemporain, alors que d'autres sont imprégnées d'une vision plus traditionaliste. Oui, on y trouve même quelques plumes et quelques fourrures.

De toute façon, reprend MmeCerdan, tous les artistes présentés posent un regard particulier sur leur art et sur leur société. Ils viennent d'horizons variés et ont des expériences diversifiées. "Nadia Myre, par exemple, est née et a grandi dans un milieu urbain, comme vous et moi. Mais sa culture est autochtone et les préoccupations qu'elle exprime, également. Cela donne un mélange intéressant."

Alors que certains artistes sont des professionnels, d'autres n'ont aucune expérience des grands circuits de l'art. C'est le cas de Nadia Myre, une Algonquine, et de la Mohawk Karen Huska. Par ailleurs, des supports qu'on n'associe pas nécessairement aux autochtones, par exemple la vidéo, sont présents. Parmi les exposants, Ernest Dominique, un Montagnais, est le plus figuratif.

Un colloque spécial
Dans le cadre de l'exposition, un colloque sur la culture amérindienne et ses modes d'expression aura lieu le 12 février. Guy Sioui-Durand et John K. Grande parleront de leur spécialité: l'art contemporain amérindien. Jacques Leorux, notamment chargé de cours à l'Université de Montréal et étudiant au doctorat, traitera de la problématique des pensionnats chez les Amérindiens. Anthropologue de terrain, il a vécu dans une communauté d'Algonquins pendant deux ans.

Nicole Beaudry, ethnomusicologue, donnera une conférence sur le tambour comme élément de la vie sociale. Isabelle Schulte Tendkhoff, de l'Organisation des Nations-Unies, parlera du droit international qui touche les communautés amérindiennes. Enfin, le film Le silence des songes, d'Arthur Lamothe, sera projeté en présence du cinéaste.

Comme ce dernier, français d'origine, Alice Cerdan a eu un choc culturel lorsqu'elle est entrée en contact avec la culture amérindienne. "Lorsque j'ai découvert des artistes comme Edward Poitras, Carl Beam, Jimmie Durham, j'ai eu carrément le coup de foudre", dit-elle.

C'était en 1996. Mme Cerdan revenait d'Espagne, où elle avait consacré une maîtrise à l'oeuvre d'un artiste catalan. Son doctorat portera donc sur Edward Poitras, un Métis qui a représenté le Canada à la Biennale de Venise en 1995. "J'avais enfin trouvé mon alibi, ma raison de préférer Montréal aux universités françaises."

L'objectif de l'exposition en cours est de permettre aux personnes peu familiarisées avec les expressions artistiques autochtones de briser la glace. Le Centre d'art autochtone de Montréal, qui participe à l'exposition, souligne ainsi sa première activité publique. Théâtre, art visuel, vidéos et autres moyens d'expression d'artistes contemporains amérindiens sont la raison d'être de ce centre, dirigé par l'historienne de l'art Monique Meunier.

Mathieu-Robert Sauvé

Artistes autochtones 1999 - Native Artists, Centre d'exposition de l'Université de Montréal, 2940, chemin de la Côte-Sainte-Catherine, jusqu'au 18 février.



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