Diagnostic révolutionnaire pour l'Alzheimer

La maladie pourrait être diagnostiquée par les ondes cérébrales.

"Le lobe latéral est particulièrement affecté par la maladie d'Alzheimer, d'où le ralentissement de l'activité cérébrale dans cette zone", explique le Dr Jacques Montplaisir.

L'équipe du Centre d'étude du sommeil de l'Hôpital du Sacré-Coeur, dirigée par le Dr Jacques Montplaisir, a peut-être trouvé une façon révolutionnaire de diagnostiquer la maladie d'Alzheimer et de mesurer l'efficacité des traitements.

Les chercheurs de ce centre ont en effet démontré que les personnes atteintes d'Alzheimer -environ 60,000 au Québec- présentent un ralentissement de l'activité cérébrale dans le lobe temporal, sur la partie latérale du cerveau. Cette modification de l'activité cérébrale, repérée par électroencéphalogramme, est plus particulièrement décelable pendant le sommeil paradoxal, caractérisé par le rêve.

"Ce ralentissement peut être observé dès la première phase de la maladie d'Alzheimer, affirme le Dr Montplaisir. Nous avons pu, par cette méthode encore expérimentale, dépister correctement 92% des gens atteints d'Alzheimer qui ont participé à notre étude."

Cette nouvelle approche s'avère donc fort prometteuse puisqu'il n'existe actuellement aucun moyen permettant de diagnostiquer la maladie d'Alzheimer hors de tout doute. Le diagnostic est établi à partir d'un ensemble de symptômes, qui ne sont pas exclusifs à la maladie d'Alzheimer, et de tests neuropsychologiques visant entre autres à mesurer l'état de la mémoire. Ce n'est toutefois qu'à l'autopsie que le diagnostic final peut être établi.

"L'avantage de notre méthode est qu'elle n'est pas affectée par des facteurs autres comme la dépression, qui peut avoir un effet négatif sur la mémoire", souligne Jacques Montplaisir. Cette méthode devient alors un outil intéressant pour préciser ou pour confirmer le diagnostic.

En plus du haut degré de fiabilité, cette méthode est plus rapide et plus facile à répéter que celle des tests neuropsychologiques; un petit échantillon d'un électroencéphalogramme effectué pendant le sommeil paradoxal est suffisant alors que l'évaluation neuropsychologique peut nécessiter une journée de tests.

La méthode ne peut par contre pas servir à dépister les cas à risque comme pourrait le faire un éventuel marqueur génétique; il faut en effet qu'il y ait un minimum de dégénérescence pour enregistrer un ralentissement de l'activité cérébrale.

Le neurotransmetteur du rêve

"Le seul inconvénient, poursuit le chercheur, c'est qu'il faut que la personne dorme et qu'elle puisse le faire dans un lieu comme un laboratoire sur le sommeil." Cette contrainte pourrait par ailleurs disparaître puisque le Centre d'étude a mis au point une technique permettant d'effectuer un électroencéphalogramme à domicile.

La période du sommeil paradoxal est plus propice à l'observation de ce ralentissement à cause de l'acétylcholine, un neurotransmetteur essentiel à la transmission de l'influx nerveux entre les cellules. "Ce neurotransmetteur joue un rôle plus marqué dans le sommeil paradoxal, explique Jacques Montplaisir. Or, la maladie d'Alzheimer entraîne une diminution de 80% de l'acétylcholine et le lobe temporal est particulièrement affecté. D'où le ralentissement de l'activité cérébrale dans cette région."

Au-delà du diagnostic, la méthode du Dr Montplaisir s'avère également prometteuse pour mesurer l'efficacité des traitements. "Nous voulons voir si l'amélioration des fonctions cognitives consécutive à un traitement s'accompagne d'une correction de l'activité électrique cérébrale." Dans un tel cas, la mesure de cette activité permettrait donc d'établir de façon rapide quels traitements ont des effets thérapeutiques.

Les recherches en ce sens se poursuivront au cours des prochaines années afin de valider la méthode. Le groupe de recherche entend entre autres suivre un groupe de personnes âgées sur une période de cinq ans afin de déterminer si celles chez qui la maladie aura été diagnostiquée présentaient, avant le diagnostic clinique, un ralentissement de l'activité électrique du cerveau.

Daniel Baril