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Sur les traces de Marie-Victorin

Excursion dans la nature à la station de biologie de Saint-Hippolyte.

Quand on marche en forêt, on est au centre d'un monde changeant, où le temps joue un rôle aussi important que la biologie, la botanique, l'écologie et les accidents naturels ou causés par l'homme. «Plusieurs de nos plantes ressemblent à celles d'Asie, car leurs ancêtres remontent à l'époque de la dérive des continents», signale la botaniste Isabelle Goulet. D'ailleurs, rajoute-t-elle, le renommé «ginseng de Corée» était cueilli... sur le mont Royal.

Auteure de la plupart des 1000 annotations ajoutées à la troisième édition de la célèbre Flore laurentienne, du frère Marie-Victorin, parue aux Presses de l'Université de Montréal en 1995, Mme Goulet a gardé une passion pour l'observation de la flore québécoise, même si elle dirige aujourd'hui une entreprise de vêtements qu'elle dessine. «On peut sortir la fille du bois, mais on ne sort pas le bois de la fille», dit-elle en riant.

Pour la jeune entrepreneure, les occasions d'aller sur le terrain sont aussi rares que précieuses depuis qu'elle a terminé sa maîtrise en sciences biologiques sur la morphologie des plantes tropicales. Elle accompagnera en forêt un groupe de volontaires (botanistes en herbe ou simples curieux) inscrits à l'atelier «Excursion en nature» du Service des activités culturelles. Cette excursion, qui aura lieu les 7 et 8 juin prochain à la station de biologie de l'Université de Montréal, à Saint-Hippolyte, prévoit l'exploration botanique de plusieurs écosystèmes.

«Ce qui est intéressant dans cette région des Laurentides, explique-t-elle, c'est qu'on part du plus simple pour se diriger vers le plus complexe. Et puis nous disposons d'un certain matériel. Par exemple, le soir, nous pourrons observer des plantes au microscope, travailler sur un herbier, projeter des diapositives...»

Du champ à la forêt

Une forêt, c'est beaucoup plus changeant que ça en a l'air, précise-t-elle. «Prenons un champ. Les espèces qui y poussent doivent pouvoir vivre sous un soleil ardant et résister au vent. On trouve d'abord des plantes vivaces - notamment la verge d'or - et des composées - la marguerite. Ensuite, les graines transportées par les animaux et le vent permettront à des bouleaux et des peupliers de prendre racine. Ces arbres poussent bien en milieu ouvert.»

Composée d'arbres qui ont sensiblement le même âge et qui peuplent rapidement l'éclaircie, la bétulaie (forêt de bouleaux) meurt assez subitement, après un demi-siècle. Ce sont les jeunes érables ayant parsemé la bétulaie qui prendront la relève et coloniseront la forêt. Le règne de l'érablière commence.

«L'érablière est une forêt très stable. Mais de vieux arbres tombent et créent une ouverture dans le couvert végétal, où d'autres espèces peuvent croître. On a alors une érablière à caryers, comme dans la région de Montréal, ou une érablière à bouleaux jaunes, plus au nord.»

Avec son groupe, la guide procédera à différentes observations qui permettront de comprendre l'évolution de la forêt. À l'intérieur de quelques centaines de mètres, les forêts de feuillus et mixtes font place à une pinède et à des tourbières.

Fascinante tourbière

«La tourbière, c'est le plus fascinant des écosystèmes, lance Isabelle Goulet. On est en plein voyage dans le temps.»

Après le lac devenu marais qui devient à son tour marécage, la sphaigne colonise peu à peu les plans d'eau peu oxygénés et forme la tourbière. La sphaigne est une plante qui pousse en longueur et qui forme après plusieurs années un véritable tapis tressé. Il est si dense que l'on peut marcher dessus. Quand on survole des régions nordiques, on aperçoit des tourbières à diverses étapes de leur développement.

On y trouve des plantes colorées, dont des orchidées et les fameuses plantes carnivores («on devrait dire insectivores», précise la botaniste), qui témoignent de la pauvreté des sols. «C'est un environnement très acide, de sorte que les plantes ont dû développer des moyens ingénieux de s'alimenter. Il y a deux espèces de plantes insectivores à Saint-Hippolyte. Cela impressionne toujours beaucoup.»

La jeune femme promet de nombreuses découvertes durant ce voyage ouvert à tous. D'ailleurs, le printemps tardif permettra de comprendre le principe des plantes printanières, qui profitent du seul moment où le soleil leur appartient (les arbres sont sans feuilles) pour boucler leur cycle reproductif.

La forêt québécoise n'est donc pas que le paradis des mouches noires. Mais qu'est-ce qui amène quelqu'un à suivre les traces de Marie-Victorin? «J'ai toujours aimé observer les plantes, dit Isabelle Goulet. Quand j'avais six ans, je me souviens, j'ai fait ma première identification scientifique. Par la suite, je n'ai jamais pu apporter un bouquet de pissenlits à ma mère sans les décortiquer pour voir comment ils étaient faits.»

Mathieu-Robert Sauvé

«Excursion en nature», les 7 et 8 juin. Prix: 50 $ pour les étudiants, 70 $ pour les employés et diplômés de l'U de M et 80 $ pour les gens de l'extérieur. Ces sommes excluent le transport, l'hébergement et les repas. Des places sont encore disponibles. Information: 343-6524.


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