Chaque ovaire d'une
vache produit des milliards de follicules. Pourtant, quelques
milliers à peine se rendent à maturité et
deviennent des ovules fécondables. Pourquoi?
C'est ce que veut découvrir Christopher Price, un jeune
chercheur d'origine britannique arrivé au Québec
en 1989 pour se joindre au Centre de recherche en reproduction
animale (CRRA) de la Faculté de médecine vétérinaire.
«Je cherche à savoir pourquoi la très grande
majorité des follicules ne se développe pas jusqu'à
la maturité. Les facteurs de cette croissance sont encore
mal connus.»
Si le Dr Price mène principalement des recherches fondamentales,
ses travaux en endocrinologie ovarienne de la vache pourraient
mener à une solution de remplacement au clonage des bêtes,
une technologie qui a ses défauts. Ainsi, l'industrie pourrait
être intéressée par les résultats de
sa recherche, car les ovules sont actuellement une denrée
rare.
«Cloner des vaches est certes un moyen avantageux d'obtenir
des bêtes performantes, explique le chercheur, mais cela
n'est pas très bon pour la diversité biologique.
Nous pourrions donc offrir un intéressant compromis entre
les besoins de l'industrie et ceux de l'espèce.»
Un bon exemple du CRRA
Le chercheur incarne bien les nouveaux axes de recherche du centre
de réputation internationale qui fête ses 25 ans
cette année. Après des études sur le développement
de l'embryon, on a effectué des travaux sur la survie embryonnaire,
puis sur la fécondation in vitro chez le cheval. C'est
aux chercheurs de ce centre que nous devons la naissance du premier
«cheval-éprouvette» au Canada.
Au début, explique le Dr Price, il s'agissait de mieux
comprendre la reproduction chez les animaux domestiques, ce qui
excluait les animaux d'élevage et les grands animaux. Peu
à peu, les checheurs se sont tournés vers ces derniers.
Ils s'y consacrent exclusivement aujourd'hui.
Les huit chercheurs étudient chaque étape de la
reproduction, de la maturation des gamètes jusqu'à
la mise bas. Christopher Price, Allan K. Goff, Jacques G. Lussier
et Paul D. Carrière se penchent notamment sur l'ovaire,
la croissance folliculaire et la maturation des ovocytes; Patrick
Guay, sur le milieu utérin en relation avec le développement
embryonnaire; Daniel Bousquet et David Silversides, sur la fécondation
in vitro et le sexage des embryons; Lawrence Smith, sur le clonage.
Quant au directeur du Centre, Bruce D. Murphy, il mène
plusieurs travaux, dont l'un sur la toxicité du gras de
béluga pour les fonctions de reproduction.
Le CRRA recevra au total, pour l'année universitaire en
cours, quelque 620 000 $ en fonds de recherche. Signe de leur
renommée, les chercheurs participent à de nombreux
congrès internationaux au Canada, au Brésil, au
Mexique et aux États-Unis, en plus de publier un grand
nombre d'articles scientifiques. Actuellement, 9 étudiants
à la maîtrise et 13 au doctorat sont rattachés
au Centre.
Les 25 ans du Centre de recherche en reproduction animale seront
célébrés dans le cadre d'un colloque le 5
novembre prochain, à Saint-Hyacinthe. Il regroupera des
spécialistes venus de plusieurs universités.
De Londres à Saint-Hyacinthe
Pour Christopher Price, qui est citoyen canadien depuis trois
mois après avoir vécu au Royaume-Uni et en Nouvelle-Zélande,
Saint-Hyacinthe est une terre d'accueil agréable. «Je
me sens canadien depuis trois ou quatre ans. Cette appartenance
est venue peu à peu. Nous sommes différents des
Américains et des Européens, tout en étant
un peu des deux. C'est un cliché, mais c'est comme ça.»
Et l'hiver dans tout ça? «Vous savez, quand on a
passé son enfance à Londres où tout est gris
plusieurs mois par année, l'hiver canadien n'est pas tellement
un problème.»
Mathieu-Robert Sauvé