Après la médaille
d'or du CRSNG et le Arthur C. Cope Scholar Award de l'American
Cheminal Society obtenus au printemps dernier ainsi que le prix
Marie-Victorin (prix du Québec), qui lui a été
attribué en décembre, le professeur Stephen Hanessian
récolte maintenant un des deux prix Killam qui ont été
accordés cette année par le Conseil des arts du
Canada.
Professeur au Département de chimie depuis 1968, où
il occupe les chaires McConnell et de chimie médicinale
du CRSNG, M. Hanessian est une autorité internationale
en chimie organique; ses travaux ont conduit à plusieurs
innovations en synthèse moléculaire. Plus précisément,
il est connu pour la mise au point de la méthode Chiron
et de sa transposition informatique. La méthode consiste
à prédire, à partir de l'observation et de
l'analyse de la structure stéréochimique de composants
organiques, un plan de synthèse logique. Les synthèses
qui ont fait la célébrité du professeur Hanessian
étaient fondées sur l'emploi, comme produit de démarrage,
de sous-structures moléculaires (énantiopurs) formées
de parties identiques mais disposées dans un ordre inverse
par rapport à un axe de symétrie, un peu à
la manière de l'image miroir d'un objet.
Il est ainsi parvenu à synthétiser une pléiade
de substances naturelles et de nouveaux agents médicaux
tels antibiotiques, antiviraux et antitumoraux qui ont donné
lieu à 25 brevets.
La méthode Chiron n'est pas un instrument assurant l'atteinte
automatique de la cible mais constitue plutôt un outil interactif
ouvrant aux chimistes les voies les plus susceptibles de les conduire
à des synthèses aussi élégantes qu'économiques.
En ce sens, elle fait appel à la créativité
du chercheur et Stephen Hanessian n'hésite pas à
parler de sens esthétique en synthèse moléculaire.
Comme les oeuvres d'art, ses synthèses ont un style qui
leur est propre.
Le professeur Hanessian n'a jamais cessé de perfectionner
ses méthodes, qui ont fait école. L'ampleur et la
diversité de ses activités l'ont conduit à
la tête d'un groupe de 30 chercheurs, soit le plus important
groupe de recherche universitaire en chimie au Canada.
Parmi les prix qui jalonnent sa carrière, outre ceux déjà
mentionnés, on remarque le prix Merck-Frosst et la médaille
Palladium de l'Institut de chimie du Canada, le prix Urgel-Archambault
de l'ACFAS et le prix Bell Canada Forum. Il a également
obtenu une bourse Killam en 1989.
Auteur de plus de 330 articles scientifiques, il est également
membre de conseils d'administration de plusieurs sociétés,
revues scientifiques prestigieuses et sociétés savantes.
Comme professeur et mentor, le professeur Hanessian a formé
près de 250 scientifiques qui font aujourd'hui carrière
dans les milieux industriel et universitaire au Canada ou ailleurs.
Connu internationalement, son laboratoire est devenu un centre
de formation qui attire les jeunes scientifiques du monde entier.
Rappelons que, tout récemment, M. Hanessian faisait un
don de 25 000 $ à l'Université afin de créer
un prix qui sera attribué annuellement à un étudiant
particulièrement méritant qui s'inscrit à
la maîtrise ou au doctorat.
Créés en 1981 à la mémoire d'Izaak
Walton Killam, ces prix de 50 000 $ sont attribués annuellement
par le Conseil des arts du Canada à d'éminents chercheurs
pour souligner leur contribution exceptionnelle à l'avancement
des connaissances en sciences naturelles, en génie et en
sciences de la santé.
Gilles Brassard, professeur
au Département d'informatique et de recherche opérationnelle,
figure parmi les neuf chercheurs canadiens qui ont obtenu cette
année une bourse Killam. Ces bourses, qui sont attribuées
par le Conseil des arts, permettent à des universitaires
de se consacrer pendant un an ou deux à la recherche ou
à la rédaction d'un ouvrage.
Gilles Brassard fait figure de pionnier en ce qui concerne la
théorie de l'information quantique, un domaine de recherche
très avant-gardiste. Grâce à la bourse commémorative
EWR Steacie, qu'il avait obtenue en 1992, il avait fait de Montréal
un centre d'excellence internationalement reconnu en la matière.
La théorie de l'information quantique étudie les
conséquences de la réalité quantique sur
le traitement de l'information. Elle repose sur la différence
qui existe entre l'information classique (mode binaire) et sa
contrepartie quantique, laquelle pourrait théoriquement
mener à la réalisation d'un ordinateur à
l'intérieur duquel l'information serait livrée par
l'état d'excitation ou d'organisation de l'atome.
«En principe, davantage de calculs pourraient être
effectués en utilisant un millier de bits quantiques qu'avec
un ordinateur classique de la taille de l'univers», observe
M. Brassard.
Mais il y a loin de la coupe aux lèvres puisque s'il est
facile de transmettre l'information classique, qui peut être
amplifiée et diffusée, il n'en est pas de même
pour l'information quantique, qui ne peut pas être lue sans
être perturbée!
Avec cette bourse Killam, Gilles Brassard veut rédiger
une monographie sur la théorie de l'information quantique
principalement à l'intention d'un public d'informaticiens
n'ayant aucune connaissance préalable en mécanique
quantique.
«Il est important que les informaticiens puissent avoir
accès aux techniques quantiques, car elles ont le potentiel
de révolutionner plusieurs aspects du traitement de l'information»,
précise le chercheur. Ce qui ne l'empêchera pas de
continuer à faire reculer la frontière des connaissances
en la matière et à faire participer ses étudiants
à cette aventure.
Le comité de sélection créé par le
Conseil des arts pour désigner les lauréats a reçu
cette année
116 demandes comparativement à 156 l'année précédente.
Il a accordé 9 bourses par rapport à 14 en 1996.
Toutes les bourses accordées l'an dernier ont toutefois
été renouvelées, notamment celle d'André
Gaudreault, professeur d'études cinématographiques
au Département d'histoire de l'art.