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Un camion sur six roulant sur nos routes
transporte des déchets

Le projet pilote d'«université verte» commence par le Département de géographie.

Selon le bilan environnemental de l'Université de Montréal, publié en 1994, quelque 340 tonnes de déchets sont récupérées sur le campus sur un volume total de 2600.

«Plus de 80 % de nos déchets sont récupérables», signale Véronic Ouellet, bénévole au Groupe de recherche en intervention publique (GRIP) qui organisait, le 30 janvier dernier, une conférence sur le sujet. «Simplement avec le verre, ce sont 500 tonnes de matière qu'on pourrait éviter de jeter à la poubelle. C'est important, car le recyclage d'une seule bouteille permet d'économiser assez d'énergie pour alimenter une ampoule de 100 watts pendant quatre heures.»

Selon Michel Séguin, qui a entrepris des recherches de doctorat en environnement au Département de sociologie, les «trois R» (réduction, récupération, recyclage) ne doivent pas être une simple affaire domestique. Les déchets produits par un établissement comme l'Université de Montréal sont beaucoup plus homogènes que les déchets domestiques et, par conséquent, plus faciles à gérer.

«Ce qu'on jette au travail représente de 55 % à 65 % de tous les déchets enfouis ou incinérés. Il ne faut donc pas changer uniquement les habitudes à la maison», dit-il.

Auteur du livre Le scandale des déchets au Québec (Écosociété, 1993) et cofondateur de la coalition Action rebut, qui compte aujourd'hui une vingtaine de groupes, Michel Séguin connaît bien le domaine. Ses interventions ne visent ultimement qu'un but: transformer les déchets en ressources. Il est d'ailleurs faux de dire que l'on «élimine» les déchets. On change plutôt la composition du sol, de l'air et de l'eau. À la carrière Miron, par exemple, les déchets sont comme les grains de café dans un filtre. L'eau de ruissellement s'en imprègne avant de couler vers la nappe phréatique.

«Un camion sur six qui roulent sur nos routes est un camion à ordures. Nous créons des déchets à un rythme qui fait croire que nous avons une planète de rechange.»

Experts en poubelles

Ce n'est certes pas la première fois que des environnementalistes tirent la sonnette d'alarme de la surproduction de déchets. Mais il semble bien y avoir, cette fois, de la lumière au bout du tunnel. Dans des villages et des quartiers urbains, on trouve des «ressourceries», genre de coopératives où l'on récupère toutes sortes de choses afin de les réutiliser ou de les recycler.

Dans celle du Plateau Mont-Royal par exemple (au 2025, rue Masson), on accepte même les ordinateurs afin de les réparer et de les redistribuer. On recycle aussi les déchets organiques pour en faire du compost et les vieux vêtements pour les transformer en fibre textile.

«Nous sommes tous des experts en manipulation de la poubelle, explique M. Séguin. C'est pourquoi nous avons tous un rôle à jouer, à la différence des autres enjeux dont l'issue paraît hors de portée comme la faim dans le monde ou les conflits armés.»

Plusieurs cafés étudiants se sont laissé convaincre d'intégrer ces «trois R» dans leurs habitudes. En médecine, sciences de l'éducation, informatique, anthropologie et dans le Pavillon Marguerite-d'Youville, on dépose ainsi tout le marc du café pour en faire du compost, qui est distribué aux étudiants. On favorise aussi les tasses réutilisables.

Projet pilote

Le programme d'incitation aux «trois R», dont le projet pilote est implanté depuis peu au Département de géographie, sera éventuellement étendu à la grandeur de l'Université de Montréal. Il a reçu d'ailleurs l'aval du vice-rectorat à la planification.

Il consiste en partie en une information ciblée. Grâce à des affiches, des dépliants, des tournées de classes et des lettres individualisées aux professeurs, on tentera d'inciter la communauté universitaire à modifier sa production de déchets.

«Nous allons inciter les professeurs à donner leurs notes de cours sur disquettes ou par courrier électronique, par exemple, lorsque la chose est possible, explique Véronic Ouellet. Car le meilleur déchet est celui qu'on ne produit pas. Il faut aussi inciter les gens à utiliser le papier recto verso et à préférer le papier recyclé.»

Les bénévoles du GRIP ont déjà commencé à distribuer des affiches sur lesquelles on énumère de bonnes raisons de récupérer: une tonne de papier récupéré permet d'épargner la coupe de 15 à 20 arbres; le recyclage d'une cannette d'aluminium permet d'économiser assez d'énergie pour faire fonctionner un téléviseur durant 108 minutes; l'industrie du recyclage crée des milliers d'emplois au Québec.

Michel Séguin, qui a étudié à l'Université York, en Ontario, estime que l'on peut toujours changer nos habitudes. «Nous sommes, au Québec, les champions de la récupération de la bouteille de bière. Cela fait partie de nos moeurs. Même la consigne sur les cannettes fait en sorte que nous sommes plus avancés dans ce domaine que nos voisins. Mais dans d'autres secteurs, nous avons encore du chemin à faire.»

Mathieu-Robert Sauvé


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