Il y en a pour un million de pages et 38 000 images à
la BLSH.
Journaux, autobiographies,
échanges épistolaires, lois, procès-verbaux,
débats parlementaires, pamphlets politiques ou
factums religieux, la Révolution française a été
à l'origine d'une explosion de documents écrits.
Il y en a pour un million de pages dans la prestigieuse collection
«Les archives de la Révolution française»,
dont l'Université de Montréal est le seul dépositaire
au Québec.
Et qu'on ne s'y trompe pas. Il s'agit, sauf exception, de documents
d'époque, sur microfiches il va sans dire, écrits
durant la période 1789-1799, alors que la France politique,
sociale, religieuse, culturelle et économique était
en ébullition.
La collection inclut également un disque dur de 38 000
images, au contenu aussi diversifié que les archives. Le
tout est complété par des catalogues, répertoires,
index et une banque de données.
Forum a passé une heure et demie à examiner cette
collection; il aurait pu tout aussi bien y consacrer une vie et
demie! On imagine le mégasite Internet qu'on pourrait bâtir
à partir de ces documents. Les historiens, spécialisés
ou en herbe, s'y perdraient volontiers.
«C'est une collection très consultée, entre
autres par les gens des départements d'Histoire et d'Histoire
de l'art ou même d'autres universités», indique
Luce Payette, bibliothécaire de référence
en histoire et histoire de l'art à la Bibliothèque
des lettres et des sciences humaines (BLSH) de l'U de M, où
est conservée la collection (à la Médiathèque,
au deuxième étage).
C'est l'homme d'affaires et magnat de la presse Robert Maxwell
qui a eu l'idée de mettre sur pied cette collection. Ce
dernier voulait rassembler les documents écrits durant
cette période charnière de l'histoire de France,
à l'occasion des célébrations du bicentenaire,
en 1989. La Bibliothèque nationale de France et des spécialistes
de partout dans le monde ont participé au projet.
La collection est divisée en 12 sections: «Journaux»,
«Mémoires et autobiographies», «Collections
de base», «Bibliographie et instruments de recherche»,
«Le débat pré-révolutionnaire»,
«Les thèmes politiques», «Les résistances
à la Révolution», «La religion»,
«La réorganisation de la société»,
«L'économie», «La guerre et les colonies»
et «La culture».
Quelques exemples de ce qu'on y retrouve: les lois et articles
du gouvernement, les cahiers des états généraux,
les mémoires de Barras, des journaux tel Je suis le véritable
père Duchene, Foutre! On n'en finit plus de trouver des
perles.
Ainsi, dans le Journal de la mode et du goût de février
1790, cette description d'une nouvelle toilette portée
par une femme: «Sur ses épaules, au lieu de Mantelet,
un Mouchoir Anglais appellé (sic) Manteau...»
Aussi, ce savoureux passage au début des mémoires
de Paul Barras, relatant sa découverte de l'amour: «J'entrai
cadet gentilhomme à l'âge de seize ans au régiment
de Languedoc. Au moment de le joindre, je fus retenu par la connaissance
d'une dame des plus aimables. Elle obtint de l'évêque
de Viviers, son parent, de faire retarder mon départ. Au
bout de quelques mois, mon père usa de son autorité
pour rompre cette première liaison et m'éloigner.»
Quant au disque, c'est un éden iconographique. On y furète
à souhait, passant d'une image attendrissante de Marie-Antoinette
et du dauphin à une scène bucolique d'Arles, du
portrait de Marat à celui de Lucien Bonaparte, d'une évocation
de la prise de la Bastille à des exécutions sur
la place publique, de pièces de monnaie à des cartes,
médailles et décors de théâtre...
Pour Luce Payette, l'acquisition de cette collection fait de l'Université
de Montréal un centre d'excellence sur la Révolution
française.
Plusieurs documents récents (livres, cédéroms,
index bibliographiques, revues) ont été acquis en
complément de cette volumineuse collection. L'Université
a de plus reçu en don une collection d'originaux du journal
Le Moniteur, un des principaux journaux imprimés à
Paris durant la Révolution française.
«Tous ces documents facilitent énormément
la recherche. Un chercheur qui se consacre à la Révolution
française peut aller très loin et déblayer
beaucoup de terrain sur son sujet, uniquement en travaillant à
l'U de M», indique Mme Payette.
André Duchesne
«Sa vie, c'était sa bibliothèque; ses
livres, ses enfants.»
Les étudiants,
chercheurs et professeurs qui mènent des recherches en
histoire des sciences et de la médecine ont maintenant
un nouvel outil de travail à leur disposition.
La section «Livres rares et collections spéciales»
du Service des bibliothèques de l'Université lancera
le 9 décembre le catalogue Léo-
Pariseau, une publication en deux tomes de tous les livres d'histoire
des sciences et de médecine appartenant à ce professeur
de radiologie de la Faculté de médecine et pionnier
de la radiologie au Canada.
Comptant 757 pages, le catalogue répertorie 2720 titres,
soit plus de la moitié des livres de la collection Léo-Pariseau,
qui en compte environ 4000 et qui sont tous au service des «Livres
rares et collections spéciales», au quatrième
étage du Pavillon Samuel-Bronfman.
Pour l'occasion, une exposition de quelques-uns des plus précieux
livres de Léo Pariseau sera présentée, toujours
au même endroit.
Le premier volume inclut les notices bibliographiques complètes
et un index chronologique; le second ouvrage est divisé
en index d'auteurs, de titres et de sujets.
«Les livres de cette collection vont des postincunables
(16e siècle) jusqu'à ceux des années 1940.
Elle compte plusieurs livres rares et importants des 17e, 18e
et 19e siècles», explique Geneviève Bazin,
chef du service des «Livres rares et collections spéciales».
D'une table d'anatomie de Pietro Cortonensi datant de 1741 à
des ouvrages de Pierre Dansereau et du frère Marie-Victorin,
d'un traité sur la lumière d'Athanase Kirchr de
1646 aux ouvrages de Charles Darwin, d'une Histoire des monstres
d'Ernest Martin à de vieux dictionnaires et encyclopédies,
les perles de la bibliothèque Léo-Pariseau sont
innombrables.
Ici se croisent des auteurs de l'Antiquité tels Hippocrate,
Aristote et Galien, comme des auteurs d'ouvrages médicaux
des 16e, 17e et 18e siècles tels Paracelse, Ambroise Paré
et Georg Agricola. Léo Pariseau étant un spécialiste
de l'électricité, on retrouve plusieurs ouvrages
de Galilée, Descartes, Newton, Galvani, Ampère,
Faraday et autres hommes de science qui ont tâté
de l'ion et de l'électron.
Chef du service d'électroradiologie à l'Hôtel-Dieu
et membre fondateur de l'Association canadienne-française
pour l'avancement des sciences, dont il fut le premier président,
Léo Pariseau a acquis ses ouvrages à la suite de
voyages et d'échanges épistolaires avec des libraires
dans plusieurs grandes villes d'Amérique et d'Europe.
Il dévorait tout ce qu'il possédait. Dans ses bouquins,
les annotations foisonnent, ce qui démontre que sa bibliothèque
était bien une bibliothèque de travail. «Sa
vie, c'était sa bibliothèque; ses livres, ses enfants»,
ajoute Mme Bazin.
C'est grâce au comité des Amis de la bibliothèque
Léo-Pariseau que l'Université de Montréal
s'est portée acquéreur de cette collection à
l'automne 1943, quelques semaines avant sa mort. Parmi les membres
du groupe, on retrouve les Ernest Cormier, Georges Préfontaine,
Gérard Parizeau et autres grands personnages de l'époque.
Après avoir longtemps séjourné à la
Bibliothèque de la santé, les livres ont été
transférés en 1987 à la section des «Livres
rares», au quatrième étage du Pavillon Samuel-Bronfman.
Ils sont répertoriés dans le catalogue informatisé
Atrium depuis l'été dernier.
«C'était un des souhaits de Léo Pariseau de
laisser cette collection regroupée», insiste Mme
Bazin. Le grand homme est mort depuis un demi-siècle, mais
sa bibliothèque de travail «vit» toujours,
comme il le désirait.
André Duchesne