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Sainte-Justine, chef de file
en cardiologie foetale

Grâce à l'intervention prénatale, on peut souvent prévenir l'irréparable.

L'arythmie, les malformations cardiaques et l'insuffisance circulatoire placentaire sont trois types de pathologies qui peuvent maintenant être diagnostiquées chez le foetus et dont l'approche thérapeutique fait l'objet de recherches par le Dr Jean-Claude Fouron, qui dirige l'Unité de cardiologie foetale de l'hôpital Sainte-Justine.

Et ça ne fait que commencer, la cardiologie foetale étant en pleine expansion. «Les interventions prénatales réalisées grâce à la cardiologie foetale ont des conséquences sur toute la durée de la vie d'une personne», dit d'entrée de jeu le Dr Fouron, professeur au Département de pédiatrie de la Faculté de médecine.

C'est grâce aux développements technologiques des appareils à ultrasons qu'on est maintenant en mesure de diagnostiquer ces différents problèmes, sans danger pour la mère et l'enfant.

Les ultrasons permettent de repérer les cas de malformations cardiaques chez le foetus, entre la 16e et la 18e semaine de grossesse. «On peut dire que toutes les malformations cardiaques majeures peuvent être diagnostiquées à l'hôpital Sainte-Justine avant la naissance», indique le Dr Fouron.

Certaines de ces malformations exigent une prise en charge immédiate après la naissance afin d'éviter un décès par manque d'oxygène. On peut donc, dans ces cas, planifier une naissance dans un centre dit «tertiaire» où une équipe de chirurgiens cardiaques spécialisés s'empresse de corriger le problème dès les premiers jours de vie.

Dans d'autres cas, une malformation primaire relativement simple à corriger quand elle est isolée peut entraîner, durant la vie foetale, des lésions cardiaques secondaires qui rendent à la naissance la chirurgie beaucoup plus complexe et parfois impossible.

C'est le cas des rétrécissements valvulaires, qui entraînent souvent un défaut dans le développement du ventricule droit pour la valve pulmonaire ou du ventricule gauche pour la valve aortique.

«Nos recherches nous ont permis de déceler une accumulation importante de substances toxiques appelées radicaux libres d'oxygène dans le muscle cardiaque affecté. Il y a moyen de s'en débarrasser en administrant à la mère des antioxydants qui pourraient atteindre le foetus en traversant le placenta (la vitamine E est un exemple d'antioxydant connu).

On pourrait alors sinon empêcher la malformation, du moins prévenir les dommages cardiaques qu'elle entraîne avant la naissance. «Le bébé naîtrait avec une valve rétrécie, facile à corriger, et un muscle cardiaque par ailleurs normal», précise le spécialiste.

L'arythmie cardiaque est une autre maladie maintenant décelable grâce aux ultrasons. Au cours des cinq dernières années, 456 cas ont été répertoriés à Sainte-Justine. Ici, on peut non seulement dépister la maladie mais la guérir, avant la naissance de l'enfant, en donnant des antiarytmiques. On administre le médicament à la mère, qui le transmet à son bébé par le placenta. La vie de certains foetus admis à Sainte-Justine en défaillance cardiaque grave causée par une arythmie sévère a pu ainsi être sauvée sans séquelles.

L'isthme aortien

C'est dans le domaine des altérations circulatoires au niveau du placenta et de ses conséquences sur la croissance et l'oxygénation du foetus que les recherches du Dr Fouron et de son équipe sont les plus prometteuses.

Environ 250 cas de retard de croissance intra-utérine sont suivis annuellement à la clinique de grossesses à risque de l'hôpital. On sait déjà qu'environ 70 % des problèmes de croissance du foetus sont imputables à des échanges circulatoires déficients dans le placenta. Un mauvais échange sanguin se traduit par une carence dans le transfert en calories et en oxygène de la mère à l'enfant.

D'un bébé à l'autre, les conséquences de ce trouble diffèrent énormément. Mais chose certaine, il peut y avoir des séquelles importantes au cerveau. Il n'existe actuellement aucun moyen qui permet de déceler précocement le début d'une hypoxie cérébrale foetale avant l'apparition de signes de détresse.

Avec la technique Doppler aux ultrasons, il est possible d'évaluer la vélocité du sang et d'en calculer le débit. L'équipe du Dr Fouron essaie de tirer profit de cette technique pour reconnaître le foetus souffrant de retard de croissance chez qui l'apport d'oxygène au cerveau deviendrait insuffisant.

«Une de nos hypothèses de travail est que l'orientation du sang dans l'isthme aortien, un segment vasculaire situé sur l'aorte, permettrait indirectement de déterminer le moment où les mécanismes de protection cérébrale contre le manque d'oxygène deviendraient insuffisants», explique-t-il.

Les recherches sont menées sur des coeurs d'agneaux. Si l'hypothèse de travail se confirme, on envisagera alors différents traitements. On pense, entre autres, à donner de l'oxygène à la mère ou à extraire le foetus avant qu'il souffre de séquelles cérébrales graves. «Mieux vaut un bébé prématuré sans retard cérébral qu'un enfant à terme avec des séquelles», observe le Dr Fouron.

Ce dernier a fait état de l'avancement de ses recherches au congrès de la Société canadienne de cardiologie, tenu au début de novembre à Montréal. Il était invité à prononcer la conférence John-Keith, du nom de ce pionnier de la cardio-pédiatrie.


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